Nouveau cadre européen de transparence : Intelligence artificielle et propriété intellectuelle

🔍 Vers une IA transparente et respectueuse des droits de propriété intellectuelle

L’essor de l’intelligence artificielle (IA) bouleverse de nombreux secteurs économiques et culturels. Capables de produire du texte, des images, des vidéos ou encore des musiques, ces technologies s’appuient sur d’immenses bases de données qui, bien souvent, incluent des contenus protégés par des droits de propriété intellectuelle.

En réponse aux préoccupations des créateurs et ayants droit, l’Union Européenne a adopté le Règlement européen sur l’intelligence artificielle (RIA) en juin 2024. Ce cadre inédit vise à réguler l’usage des données et garantir une transparence accrue sur l’entraînement des modèles d’IA, visant ainsi à équilibrer innovation et respect des droits fondamentaux.

Quels sont les impacts de ce règlement sur la propriété intellectuelle ?

Comment les entreprises peuvent-elles se conformer à ces nouvelles obligations ?

Cet article vous guide à travers les nouvelles règles et stratégies à adopter pour protéger vos droits dans l’ère de l’IA générative.

Un cadre légal inédit pour protéger les ayants droit face à l’IA

L’obligation de transparence : un pilier du RIA

L’article 53 du RIA introduit une obligation de transparence pour les fournisseurs de modèles d’IA.

Concrètement, ces derniers doivent :

  • Démontrer la conformité des données utilisées : une politique claire de collecte et d’utilisation des données doit être mise en place.
  • Fournir un résumé détaillé des données d’entraînement : ce document accessible au public permettra aux créateurs de vérifier si leurs œuvres ont été exploitées.

🎯 Objectif ? Créer un environnement plus équilibré, où innovation technologique et respect des droits fondamentaux des créateurs coexistent.

Les nouveaux enjeux pour les titulaires de droits

L’obligation de transparence introduit des changements profonds pour les acteurs de la création et les fournisseurs d’IA. Ces derniers devront procéder à l’identification des contenus protégés, le résumé détaillé exigé par le RIA incluant des informations essentielles telles que les noms de domaine et les URLs datés des contenus utilisés. Cette transparence permettra aux titulaires de droits d’exercer leurs prérogatives et de demander une rémunération ou d’exclure leurs œuvres de l’entraînement des modèles.

Cependant, des limites sont imposées par le secret des affaires. Le résumé ne doit pas révéler les techniques spécifiques d’entraînement (tokenisation, filtrage, etc.) afin de préserver le secret industriel. Il s’agit donc de fournir une liste des « ingrédients » sans divulguer la « recette ».

Des défis liés aux clauses d’opt-out se posent. Les titulaires de droits disposent d’outils techniques pour indiquer leur opposition à l’utilisation de leurs contenus (robots.txt, ai.txt, etc.). Cependant, l’absence de standardisation limite l’efficacité de ces dispositifs. Le RIA pourrait inciter à la création d’un registre centralisé pour faciliter la gestion des droits.

Le RIA impose aux développeurs d’IA de procéder à l’identification des contenus protégés, ce qui représente une avancée majeure pour les ayants droit.

Ainsi plusieurs défis demeurent :

  • Identification des contenus protégés : Les fournisseurs d’IA doivent désormais documenter précisément les sources utilisées.
  • Maintien du secret industriel : Le résumé des données ne doit pas révéler les techniques spécifiques d’entraînement, garantissant ainsi la protection du savoir-faire des entreprises.
  • Gestion des exclusions (opt-out) : Bien que les créateurs puissent refuser l’utilisation de leurs œuvres, l’absence de standardisation limite l’efficacité de ces mesures.

🔹 Étude de cas : Ross Intelligence vs. Thomson Reuters (2024)

En 2024, une décision de justice aux États-Unis a statué que Ross Intelligence avait violé les droits d’auteur de Thomson Reuters en utilisant son contenu pour entraîner un produit d’IA. Cette décision pourrait créer un précédent affectant l’industrie de l’IA, signalant que les entreprises d’IA pourraient devoir compenser l’utilisation de contenus protégés par le droit d’auteur.

Sommet Paris 2025 pour l’action sur l’intelligence artificielle

Les 10 et 11 février 2025, Paris a accueilli le Sommet pour l’Action sur l’Intelligence Artificielle. Des experts, chefs d’État et dirigeants d’entreprises y ont débattu des régulations à venir pour une IA plus transparente et éthique.

📌 Ce qu’il faut retenir :

  • Un appel à la création d’un registre centralisé pour les œuvres protégées.
  • La mise en place d’une charte de bonne conduite pour les entreprises développant des IA génératives.
  • Des discussions autour d’une rémunération obligatoire des ayants droit pour chaque utilisation de leur contenu.

(Source : Résumé du Sommet IA 2025 – Présidence de la République

Comment protéger vos créations face à l’IA générative ?

1. Auditez votre exposition à l’IA

Avant toute action, commencez par un audit précis de votre situation :

  • Identifiez vos actifs protégés (marques, œuvres, bases de données).
  • Analysez votre présence numérique : vos créations sont-elles référencées dans des bases publiques ?
  • Surveillez les IA génératives : utilisez des outils de détection pour savoir si votre travail a été utilisé.

🔹 Exemple : Une agence de design victime d’un entraînement IA non autorisé
Une agence graphique a découvert que ses œuvres étaient utilisées par un modèle d’IA pour générer des images similaires. Grâce à l’article 53 du RIA, elle pourra désormais demander un accès aux données d’entraînement et, si nécessaire, exiger une compensation.

2. Sécurisez contractuellement vos œuvres et innovations

Pour éviter tout usage abusif, adoptez des contrats solides :

  • Ajoutez des clauses spécifiques à vos CGV et contrats (interdiction d’utilisation pour l’entraînement d’IA).
  • Prévoyez un suivi des droits : définissez précisément l’utilisation autorisée de vos œuvres.
  • Travaillez avec des plateformes qui respectent le RIA : privilégiez des partenaires transparents dans leur gestion des données.

💡 Astuce : Pensez aux solutions techniques
Utilisez des fichiers protégés par des balises (robots.txt, ai.txt, DRM) pour restreindre l’accès de vos contenus aux IA.

3. Optez pour la meilleure protection juridique

Les créateurs et entreprises peuvent recourir à plusieurs outils pour protéger leurs actifs immatériels :

  • Brevets et innovation IA
  • Un algorithme seul ne peut être breveté, mais son application technique oui (ex. : IA pour le diagnostic médical).
  • Déposez un brevet logiciel si votre IA repose sur un procédé innovant.

Q&R sur la protection de l’IA et du droit d’auteur

Q : Un texte généré par IA est-il protégé par le droit d’auteur ?
R : Non, sauf si une intervention humaine significative est prouvée.

Q : Peut-on breveter un modèle d’IA ?
R : Seules les applications techniques sont brevetables, pas l’algorithme en lui-même.

Une réglementation au service d’une IA éthique et respectueuse

Le RIA marque un tournant pour les entreprises et les créateurs. En imposant plus de transparence, il permet aux ayants droit de mieux contrôler l’utilisation de leurs œuvres et ouvre la voie à un marché plus éthique.

Comment agir dès maintenant ?

  • Faites auditer votre exposition à l’IA.
  • Adaptez vos contrats et CGU aux nouvelles obligations.
  • Protégez vos innovations par les outils juridiques adaptés.

Besoin d’un accompagnement juridique sur l’IA et la propriété intellectuelle ?

Que vous soyez créateur, dirigeant d’entreprise ou innovateur, il est essentiel de prendre les bonnes décisions pour protéger vos actifs face aux nouvelles réglementations IA.

Le Cabinet Nathalie Matteoda vous accompagne dans la protection et la valorisation de vos créations face aux défis de l’IA :

✔ L’audit et la protection de vos droits (marques, brevets, œuvres protégées).
✔ L’adaptation de vos contrats et CGU face aux obligations du RIA.
✔ La défense de vos intérêts en cas de litige contre une entreprise d’IA.

🚀 L’IA est une opportunité, mais elle ne doit pas se faire au détriment de vos droits. Ne laissez pas votre travail être exploité sans votre accord !

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